salut les amis,
ce matin sur l’autoroute, ça roule bien.
le régulateur à 130 km/h,
le soleil de début de journée qui réchauffe
et qui impose une certaine torpeur dans la cabine.
c’est pas bob qui conduit, c’est son collègue.
peu de monde,
les parisiens sont au boulot.
c’est agréable,
les conducteurs mettent leur clignotant pour changer de voie,
roulent à droite.
on est entre gens de l’autoroute,
y’a du respect.
pas comme ceux qui conduisent que dans la ville,
et quand ils arrivent sur l’autoroute ils font n’importe quoi,
et qui roulent à 150 et quand y’a un radar ils se mettent à rouler à 110
ou si y’a un camion à 1 km devant ils se mettent sur la file de gauche
sans prévenir et en ralentissant parce qu’ils ont un peu peur des camions
et y font chier tout le monde
ou y’en a aussi qui se postent dans ton angle mort
et qui roulent à la même vitesse que toi pendant 10 km
et qui accélèrent d’un coup à 160 et après ils ralentissent à 120
parce qu’ils se sont rendus compte qu’ils roulaient trop vite
et tu les redoubles
et tu les vois te redoubler à 160
parce qu’ils se sont rendus compte qu’ils roulaient trop lentement
et t’as envie de leur expliquer comment ça marche un régulateur.
y’a aussi ceux qui…
…pardon.
bob s’emballe, il reparlera de la conduite sur autoroute une autre fois.
revenons à nos moutons.
là, y’a que des autoroutiers, ça roule quoi...
on avance.
sur le siège passager, bob laisse sa tête reposée sur l’appui tête,
les yeux ouverts mais les paupières lourdes,
syrup sort des enceintes,
ça sent le pain au chocolat et le café
parce qu’on en a acheté à la station service juste avant
parce que ni l’un ni l’autre n’avons déjeuné,
bob parce qu’il s’est couché tard hier soir,
parce qu’il y avait du monde à la maison
et il devait finir tôt et en fait, non
et il s’est levé à la dernière minute
et le collègue de bob parce qu’il a pas entendu son réveil ce matin
et il s’est aussi levé à la dernière minute.
bob regarde par la fenêtre,
avec la vitesse, les barrières de sécurité semblent flotter dans les airs.
c’est drôle parce qu’à l’intérieur de la cabine, tout semble calme,
comme suspendu, tranquille.
soleil, régulateur, musique, odeur de café et de pain au chocolat...
quand tout à coup !
(musique angoissante)
le collègue et bob se redressent dans un même geste,
les yeux grands ouverts,
le coeur en accélération, qui tape fort dans la poitrine.
les pieds du collègue dans un réflexe de conducteur
viennent se coller aux pédales de freins
et d’embrayage sans les enfoncer,
avec rapidité mais avec délicatesse,
juste en prévention,
au cas où...
parce que 100 mètres devant,
y’a un truc sur la voie de gauche qu’on arrive pas à identifier.
tous les sens en alerte,
les yeux qui se plissent pour essayer de comprendre ce que c’est.
100 mètres devant quand on roule à 130km/h,
on a environ 2,77 secondes pour réagir.
pour calculer ce temps, bob utilise la règle de trois ou produit en croix.
si je fais 130 km en 1heure, pour faire 0,1 km, ça me prend combien de temps (Y)
une heure est égale à 3600 secondes,
donc on pose 130xY=3600x0,1
soit Y= (3600x0,1)/130
soit Y= 360/130
Soit Y= 2,769230769230769230769230769230769230769230769230769230769230…
(ad libitum)
(expression latine ici mal utilisée car son sens premier est
« jusqu’à ce que je sois pleinement satisfait »
mais elle est parfois utilisée comme quasi-synonyme de « à l’infini »,
c’est pourquoi bob se permet de l’utiliser ici)
soit Y = 2,77 secondes (en gros)
ça fait très peu de temps pour réagir,
et pendant ces 2,77 secondes,
on passe par toutes les émotions.
tout d’abord, la surprise.
mais bon dieu ! mais qu’est ce que c’est !?!?! ça bouge !
puis, la peur.
meeeerdee, pourvu que ça ne change pas de voie
parce que sinon on va se le prendre !!!!!
et pourvu que le collègue ne donne pas un coup de volant pour l’éviter
parce qu’à cette vitesse là, on est mort.
et enfin, le soulagement.
oh ! c’est une maman canard avec ses petits qui la suivent !
hihihi, comme c’est mignon !!!
regarde comme ils ont l’air heureux ces petits canards !
si insouciants, ils sont bien rangés à la queulêulëu !
c’est trop chou !
on dirait des…..
quand on est arrivés à leur hauteur,
la voiture qui nous doublait a fauché toute la petite famille.
parce que bob est sympa,
il vous épargne la description du choc même s’il en a très envie.
bon…
sur les kilomètres qui ont suivi,
en repensant à ce qu’il venait de vivre,
bob s’est dit :
en fait, on ressemble à ces canards.
on est là,
tranquilles,
on avance,
droit devant,
bien rangés,
heureux presque,
sans se rendre compte de ce qui nous attend.
et paf, tout s’arrête.
et ça a foutu le cafard à bob tout le reste de la route.
plus rien à foutre du soleil, de la musique,
des odeurs de café et de pain au chocolat.
juste le cafard.
putain de canards.
bob