Sources d’inspiration

Sources d'inspiration

Christelle Hunot puise son inspiration dans le champ de l’art du textile, des arts plastiques et du livre d’artiste. Son travail s’ancre dans une relation à l’intime, à la famille et à l’enfance. L’imaginaire, la créativité, le prendre soin, le partage et la présence aux autres sont au cœur de son travail.

Extrait de Ce que nous voyons, ce qui nous regarde, Georges Didi-Huberman

L’enfant à la bobine avait bien inventé, par son jeu rythmique - c’est-à-dire élémentaire temporalisé, voire temporisateur -, un lieu pour inquiéter sa vision, et donc pour œuvrer toutes les expectatives, toutes les prévisions à quoi son désir le portait. Par le fait même, cette inquiétude était comme l’œuvre de son jeu, alors que la bobine allait et venait, franchissant le seuil du lieu pour disparaître, revenant franchir le seuil du lieu pour apparaître... Et ce qui jouait véritablement à franchir ces seuils, à créer ces lieux, c’était bien l’acte du jet - l’acte simple et complexe du jet compris dès lors comme fondateur du sujet lui-même.

Or, dans cet aller et retour, où un lieu s’instaure, où néanmoins " l’absence donne contenu à l’objet " en même temps qu’elle constitue le sujet lui-même, le visible se trouve bien de part en part inquiété : car ce qui est là présent risque toujours de disparaître au moindre geste compulsif ; mais ce qui disparaît derrière le rideau du lit n’est pas tout à fait invisible, encore tactilement retenu par le bout de la ficelle, déjà présent dans l’image répétée de son retour ; et ce qui réapparaît tout à coup, la bobine surgissante, n’est pas visible non plus de toute évidence et de toute stabilité, puisqu’elle virevolte et roule sans cesse, capable à tout instant de disparaître à nouveau. Ce que l’enfant voit, un jeu du proche et du lointain, une aura d’objet visible, ne vaut ici qu’à chanceler, et constamment inquiète la stabilité de son existence même : l’objet constamment risque de se perdre, et le sujet avec lui qui en rit. La dialectique visuelle du jeu - la dialectique du jeu visuel - est donc aussi une dialectique d’aliénation, comme l’image d’une contrainte du sujet à disparaître lui-même, à vider les lieux.